Dans le cas d'être réélu Président aux élections présidentielles au printemps 2022, Emmanuel Macron tentera de catalyser le chauvinisme des Français en rétablissant l'atavisme de «La Grandeur», une doctrine qui conjuguerait le culte de l'indépendance économique, politique et militaire de la France avec la consolidation de la mission de la Nation et de la culture française dans le monde. Il assumera le pouvoir décisionnel de la Défense et des Affaires étrangères qui deviendra «le domaine réservé du Président» et adoptera une approche «militante» dans les affaires internationales, s'impliquant personnellement.
Il utilisera «l'engagement d'une intervention humanitaire» pour «accroître le poids spécifique de la France dans la géopolitique mondiale comme épine dorsale de sa politique étrangère». La politique intérieure sera réduite à un simple instrument de politique étrangère servant de catalyseur aux valeurs de «La Grandeur» vis-à-vis des structures militaires de l'Otan, de la revitalisation de la Francophonie en tant qu'entité politique et économique sur la scène mondiale à l'horizon 2025.
Distanciation américaine. L'accord stratégique entre l'Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis connu sous le nom d'AUKUS, implique la vente de sous-marins nucléaires nord-américains à l'Australie en même temps qu'un fiasco économique pour la France estimé à 50 000 millions d'euros. Ainsi, la rupture unilatérale par le gouvernement australien d'un méga-contrat avec la France pour 12 sous-marins conventionnels, aurait provoqué la colère du gouvernement français et l'appel à des consultations de ses ambassadeurs à Washington et Canberra, ce qui, conjugué à l'arrêt éventuel de la vente d'avions de chasse Rafale à l'Inde, pourrait provoquer la désaffection de la France envers «l'ancien partenaire américain» et pourrait se traduire par le départ de la France des structures de l'Alliance atlantique à l'horizon 2023.
La sortie de la France de l'Otan? Après «le coup de poignard dans le dos» matérialisé par la signature de l'accord AUKUS contre la France, Emmanuel Macron profitera de la présidence de l'UE, qui débute en janvier 2022, pour promouvoir l'initiative de l'Agence européenne de défense (AED), une entité de défense qui a pour but de couper le cordon ombilical avec les Etats-Unis via l'Otan en étant constitué des pays de la zone d'influence originelle de l'axe franco-allemand (Hollande, Danemark, Norvège, Belgique, Luxembourg et Autriche). C' est le résultat de la réaffirmation des souverainetés nationales française et allemande comme stratégie défensive contre la dérive de l'ancien «partenaire américain», (relance du traité de l'Elysée entre le général de Gaulle et Konrad Adenauer (1963)). Cela impliquerait la nécessité d'une «souveraineté militaire et technologique européenne» qui pivoterait sur la «force de frappe» nucléaire française, le chasseur européen de sixième génération auquel participent Airbus et Dassault et le plus récent sous-marin nucléaire lanceur d'engins de troisième génération SNLE 3G. On la verra être promue au sommet de l'Alliance atlantique qui se tiendra à Madrid en juillet 2022 et qui pourrait marquer le début de la disparition de l'Otan qui, selon les mots http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=1509 d' Emmanuel Macron à l'hebdomadaire The Economist «est en état de mort cérébrale».
La désaffection d'Emmanuel Macron envers les Etats-Unis conduira à un rapprochement politique avec la Russie (rappelant le voyage du général de Gaulle à Moscou,1966), une doctrine qui s'incarnera dans la ratification de la politique de bon voisinage avec la Russie de Vladimir Poutine en signant les accords préférentiels pour assurer l'approvisionnement en gaz et pétrole russes et accroître les échanges commerciaux et la sortie de la France des structures militaires de l'Otan, (imitant le démantèlement d'une trentaine de bases américaines sur le sol français par le général de Gaulle (1966)), ayant à nouveau comme épine dorsale la «force de frappe». Depuis le général de Gaulle, la résistance au leadership américain a été un facteur dans la politique étrangère de tous les présidents français, mais l'écart ne sera que formel, comme en témoigne le soutien du général de Gaulle aux Etats-Unis dans la crise des missiles de Cuba (1962) et dans son retour ultérieur à la discipline du pacte de l'Atlantique Nord en 1969, mais sous les prémisses d'opérer librement au sein de l'Alliance atlantique et de maintenir l'indépendance nucléaire, étant, pour faire court, «un allié solidaire mais autonome».
Vers la réaffirmation de la souveraineté européenne? Selon le site ICAN http://icanfrance.org/depenses-mondiales-armes-nucleaires-2020/ «le projet de loi de finance de 2020 consacrait 4,7 mds € (environ 11% de son budget de la défense) à la politique de dissuasion nucléaire ; soit 8 969 € (10 786 $) par minute pour son arsenal nucléaire», «une somme en augmentation de 500 € par minute en comparaison avec 2019», précisant: «la facture va continuer de s’alourdir, entre 2021 et 2025, puisque la France consacrera, selon la Loi de programmation militaire (LPM), la somme de 27,85 milliards d’euros». Tout cela se passe, bien qu'en janvier 2021, avec le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN), la France s'est abstenue de le ratifier après avoir déclaré que ledit traité «est insuffisant dans le contexte de la sécurité internationale actuelle» tout en exigeant «une approche réaliste du désarmement qui se fasse étape par étape». La responsabilité des forces armées est partagée entre le Président et le Premier ministre selon la Constitution française de 1958, mais un décret de 1962 n'attribue qu'au Président le pouvoir d'autoriser l'emploi d'armes nucléaires. Rappelons que la «force de frappe» est née en 1960 à la suite de la proclamation de la Ve République française par le général de Gaulle et elle a été conçue comme l'un des éléments-clés de l'indépendance économique, diplomatique et militaire du pays vis-à-vis des deux grandes puissances, US-URSS, confrontées dans la guerre froide.
Aujourd'hui, la France détient moins de 300 armes nucléaires d’après Emmanuel Macron. Enfin, l'entente franco-allemande conjuguera les accords énergétiques préférentiels via la Russie avec la redynamisation de l'énergie nucléaire et le développement extraordinaire des énergies renouvelables et sera la référence politico-économique européenne pour le prochain quinquennat, n'étant pas exclue la refonte d'une nouvelle cartographie européenne qui impliquerait la colonisation de l'UE actuelle et son remplacement par l'Europe des Six (France, Allemagne, Belgique, Luxembourg, Hollande et Italie), tandis que le reste des pays européens périphériques et émergents restera leurs anneaux orbitaux.
Germán Gorraiz López, analyste politique
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