Le programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) a publié le Rapport 2021 sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière de production ((Production Gap Report 2021). Selon les plans des gouvernements mondiaux, la production d'hydrocarbures augmentera de 110% d'ici 2030. Une hausse significative de pétrole et de gaz est attendue, et seulement une légère baisse de la production de charbon, la source d'énergie la plus sale, dont la production augmente actuellement en Chine.
Il sera impossible de stopper l'augmentation de la température depuis l'époque préindustrielle à hauteur de 2°C, sans parler de 1,5°C, car l'accord de Paris sur le climat ne possède pas de mécanismes précis de réalisation. Parmi les auteurs du rapport prévalent des chercheurs de l'Institut de Stockholm pour l'environnement (SEI pour Stockholm Environment Institute).
Voici les conclusions des scientifiques: les entreprises et les autorités ont peu changé leur attitude envers le secteur énergétique depuis 2019, quand le rapport précédent était rédigé. Ils sont particulièrement préoccupés par la mise sur le charbon: bien que dans l'ensemble sa production baisse légèrement, ce n'est pas du tout suffisant: pour atteindre l'objectif initial de stopper le réchauffement à hauteur de 1,5°C, la production de charbon doit être inférieure de 240% qu'il n'est prévu par les gouvernements, pour le pétrole et le gaz ces indicateurs doivent diminuer de 57% et de 71% respectivement.
Bien évidemment, rien de tel n'arrivera. Par exemple, The New York Times écrivait que même le président Joe Biden avait dû fermer l'un des programmes de soutien des sources d'énergie renouvelables, alors qu'il qualifiait la protection de l'environnement et le développement de l'énergie alternative de tâches importantes. Il s'agit d'une somme assez conséquente de 150 milliards de dollars. La réduction des dépenses, selon le quotidien, a été exigée par le sénateur démocrate de la Virginie-Occidentale Joe Manchin. Ce dernier représente les intérêts d'un État qui, au même titre que Wyoming, possède un secteur de production de charbon développé, offrant du travail à 2% des habitants de l'État, sachant que Joe Manchin est lui-même né dans la ville minière de Farmington, qui se transforme actuellement en village fantôme.
La Chine renonce elle aussi aux plans de réduire significativement la production de charbon. Le pays manque d'énergie, c'est pourquoi Pékin a déjà annoncé ses projets de construire davantage de centrales thermiques au charbon, écrit The Guardian. Le parti communiste a rapidement revu ses déclarations concernant l'intention de réduire l'empreinte carbone après que la crise énergétique a éclaté dans le pays.
Une augmentation de la production de charbon est prévue en Russie, et surtout en Inde, estiment les auteurs du rapport. Bien que les États-Unis prévoient de réduire la production de charbon, ils produiront davantage de pétrole et de gaz, tout comme l'Arabie saoudite. La production de pétrole et de gaz augmentera dans une moindre mesure au Brésil, au Mexique et en Australie.
Les pays du G20 ont alloué près de 300 milliards de dollars pour le soutien de l'énergie traditionnelle depuis le début de la pandémie, ce qui est supérieur aux dépenses pour soutenir le développement des sources d'énergie renouvelables. Au final, à la veille du sommet de Glasgow sur le climat, qui commencera le 31 octobre, les tendances ne sont pas des plus rassurantes.
Les auteurs du rapport reconnaissent que leurs conclusions ne peuvent pas être interprétées comme parfaitement exactes. Le fait est que certains facteurs ont été choisis spéculativement, parce que les gouvernements ne dévoilent pas entièrement leurs plans de développement du pays à des années d'avance.
Néanmoins, une chose est sûre: la forte nécessité de sources d'énergie ira à l'encontre de la volonté de développer l'énergie alternative. Ce n'est pas prouvé que le bruit dans le milieu écolo et dans la presse libérale suffira. La question principale est de savoir si l'humanité elle-même est prête à réduire ses appétits pour protéger la nature et changer la tendance du marché libre - l'augmentation de la production d'hydrocarbures en rapprochant le moment de leur épuisement? La pertinence de cette question grandit au vu des crises énergétiques en Europe et en Chine.
En même temps, il n'est pas exclu qu'indirectement le choix du modèle de développement de l'humanité puisse être défini non seulement par les pays développés, mais aussi émergents. Il existe plusieurs États où la population continue de grandir à l'exponentiel. Par exemple, c'est le cas au Nigeria où une femme en moyenne possède plus de sept enfants. L'humanisme est bien plus prioritaire que les objectifs de protection de la nature. Quoi qu'il en soit, il faudra nourrir, habiller et chauffer les gens. Ce qui nécessitera inévitablement du combustible. Et c'est peu probable que l'énergie alternative puisse remplacer la traditionnelle à part entière. En cas de déficit d'énergie, il faudra certainement développer toute production qui permettrait d'en produire.
Alexandre Lemoine
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