L’annonce du président étasunien sur le retrait des troupes se trouvant en Afghanistan au plus tard le 11 septembre 2021 ne satisfait pas les Talibans, qui réclament un retrait pratiquement immédiat. Retour sur la question.
Le président US Joe Biden a annoncé que la date limite pour le retrait des troupes étasuniennes (et plus généralement de l’Otan qui suivront les prérogatives de Washington) d’Afghanistan sera le 11 septembre 2021 – le jour du 20ème anniversaire des attentats terroristes aux Etats-Unis, ayant été utilisés comme la principale raison de l’invasion étasunienne en terre afghane. Une invasion qui est aujourd’hui considérée comme étant la plus longue guerre menée par les USA. Une guerre dont ils ne sortent pas victorieux.
Cette annonce pose désormais plusieurs défis supplémentaires. Notamment pour la conférence d’Istanbul – étant vue comme une initiative étasunienne, visant à donner un nouvel élan au règlement afghan. Car du côté des Talibans, après avoir appris la nouvelle du report de la date de retrait du 1er mai au 11 septembre, la position a été de dire qu’ils refusaient désormais de participer à de quelconques événements internationaux – tant que les Etats-Unis n’auront pas respecté l’accord initial.
Pour rappel, l’accord initial signé entre les USA et les Talibans dans la capitale qatarie Doha en février 2020 prévoyait effectivement le retrait des troupes de la coalition d’ici mai 2021. Cependant, Washington n’a jusqu’à présent fait que réduire le contingent sur place – de 8000 à 2500 militaires.
Les autres membres de l’Otan suivent les décisions washingtoniennes de près quant au retrait qu’ils appliqueront vraisemblablement aussi. C’est ce qu’avait d’ailleurs déclaré tout récemment la ministre allemande de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer: «Nous avons toujours dit: nous entrons ensemble (avec les Américains), nous sortons ensemble».
Pour revenir aux Talibans, au-delà de menacer de ne plus prendre part aux divers pourparlers internationaux sur l’Afghanistan coordonnés par les Etats-Unis, ils laissent clairement planer le risque d’une détérioration de la situation sécuritaire sur le terrain: «Si l’accord est violé et que les forces étrangères ne quittent pas notre pays dans le délai convenu, les problèmes vont certainement empirer et ceux qui ont violé l’accord seront tenus pour responsables . C’est ce qu’a déclaré Zabihullah Mujahid, porte-parole des Talibans.
Si les experts sont aujourd’hui partagés sur l’avenir de l’Afghanistan et sur le fait si oui ou non les Talibans prendront à terme complètement le pouvoir à Kaboul, ou seront susceptibles d’accepter à participer à une sorte de gouvernement «d’union nationale», le fait est que la très longue campagne afghane représente incontestablement une défaite évidente pour Washington, ainsi que pour l’Otan de façon générale.
En vingt années de présence, non seulement la coalition otanesque n’a pas été en mesure de venir à bout des Talibans, mais plus que cela – ne serait-ce qu’asseoir un contrôle relatif sur le terrain. Pas plus que stabiliser la situation. Avec plus de 2000 soldats tués durant cette période et plus de 20 000 blessés (rien qu’américains) et plusieurs centaines de milliards de dollars de dépenses, les Talibans continuent de contrôler environ la moitié de l’Afghanistan. Et ne prévoient pas de reculer, tout au contraire.
Mikhail Gamandiy-Egorov
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