Pour la première fois depuis l'été 2018, plusieurs avions militaires de l'armée de l'air syrienne sont apparus dans le ciel de la province de Deraa, au sud du pays, en imitant une attaque contre une région à l'Ouest, où demeurent des groupes d'opposition syrienne.
Des unités de la 4e division blindée de la Garde républicaine sous le commandement du frère du président, Maher al-Assad, ont été déployées dans la province. Cette unité assure la sécurité de la frontière jordanienne et conjointement avec la police veille à l'ordre dans les communes et aux communications de transport.
Cependant, une partie du territoire à l'Ouest reste une "tache blanche": plusieurs communes sont contrôlées par des groupes d'opposition radicale Fajr al-Islam (Aube de l'islam) sous le commandement du chef de guerre Khaldoun al-Zouabi, qui a refusé de remplir les accords russo-américains prévoyant un abandon total de la résistance armée et la remise à l'armée syrienne de l'armement lourd.
La situation dans le sud de la Syrie est loin d'être stable: l'activité subversive de la clandestinité terroriste s'est intensifiée. En 2018, la Russie a soutenu la proposition des Etats-Unis et de la Jordanie de cesser les activités militaires dans le sud de la Syrie afin d'éviter des victimes parmi les civils locaux et d'éviter la destruction de nombreuses communes. Selon l'entente, une grande partie de combattants avec leurs proches a été transférée dans la province d'Idlib.
Dans le sud du pays demeurent des groupes d'opposition syrienne dont le commandement a renoncé à l'activité antigouvernementale et a intégré ensuite une nouvelle unité de l'armée régulière – le 5e corps d'armée des forces armées syriennes.
En même temps, un grand nombre de combattants de l'opposition irréconciliable a réussi à esquiver un déplacement forcé au nord du pays. Plusieurs d'entre eux sont partis vers l'est et ont rejoint les groupes créés par les Américains de ce qu'on appelle la "nouvelle armée syrienne" à la base militaire américaine d'al-Tanf à la jonction des frontières de la Syrie, de l'Irak et de la Jordanie. Sachant qu'une partie des terroristes s'est retirée dans une profonde clandestinité au sud.
En ce qui concerne les troupes de Khaldoun al-Zouabi, pendant longtemps il a réussi à résister à la pression des leaders de la clandestinité, à manœuvrer entre les forces "irréconciliables" et gouvernementales. Jusqu'à un certain moment, le commandement de la division de la Garde républicaine s'abstenait d'établir son contrôle sur les régions où étaient déployés les troupes de Fajr al-Islam, ne disposant pas de renseignements suffisants sur leurs liens avec la clandestinité.
Les anciens combattants de Daech avec les "irréconciliables" locaux déstabilisent constamment la situation dans le sud du pays. Les attaques armées contre les militaires, le minage des routes, les explosions de véhicules, les assassinats de policiers et des représentants de l'autonomie locale sont devenus un grave problème dans la région. A noter que les ripostes des militaires et des forces de sécurité syriennes sont loin de toujours correspondre aux normes juridiques de l'Etat, en suscitant la colère de la population.
Le commandement de la 4e division a tenté plusieurs fois, en vain, d'établir le contrôle sur la région où se trouve Fajr al-Islam. La dernière en date a été entreprise le 13 janvier et a conduit à un violent affrontement armé contre les combattants aux abords de Tafas, entraînant la mort de 11 militaires syriens.
Le commandement syrien s'est entretenu avec l'administration centrale de la province de Deraa et a exigé des combattants de remettre aux autorités ou d'expulser d'ici la fin du mois à Idlib 8 instigateurs de l'incident, de remettre les armements lourds, de laisser l'armée syrienne entrer dans la région et de remettre sous son contrôle tous les bâtiments des établissements publics.
En cas de refus de remplir ces conditions, les forces syriennes lanceront une vaste opération militaire pour éliminer entièrement les groupuscules dans cette région. L'administration centrale a promis de répondre à cet ultimatum.
Alexandre Lemoine
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