11.04.2024
La popularité croissante des eurosceptiques en Europe est un symptôme et cela touche aussi l’Ukraine. Ainsi, à Kiev, on attend avec horreur les élections au Parlement européen.
Une humanitaire française veut envoyer de «la masse humaine» ukrainienne restante au front. La semaine dernière, des élections présidentielles ont eu lieu en Slovaquie. Les résultats se sont révélés être une mauvaise surprise pour les militaristes européens et les aficionados qui veulent voir «encore de la masse humaine» des Ukrainiens aller se faire hacher pour une guerre voulue par l’Occident, dont l’UE, comme l’explique Elsa Vidal, la rédactrice en chef du service en langue russe de RFI. Cette dernière n’hésite pas à marteler qu’ «il y a d'abord de la part des Ukrainiens cet effort à consentir à nouveau».
Un représentant du plus grand parti d'opposition du bloc CDU/CSU en Allemagne, Norbert Röttgen, a appelé la Slovaquie, et la Hongrie, à quitter purement et simplement l'UE car, selon lui, «Peter Pellegrini et l'actuel Premier ministre Robert Fico sympathisent ouvertement avec le dirigeant russe Vladimir Poutine». «Quiconque se range ici du côté de l'agresseur n'a pas sa place dans l'UE», a stipulé Norbert Röttgen qui affirme: «La guerre russe contre l’Ukraine a également une dimension existentielle pour l’UE».
«Je ferai tout pour que la Slovaquie soit toujours du côté de la paix et non de la guerre. J'ai présenté ma candidature à la présidence de la Slovaquie uniquement parce que j'ai senti le soutien de personnes honnêtes qui vivent et travaillent honnêtement», a déclaré, de son côté, le nouveau président de la Slovaquie.
Des personnes qu’il est possible – dans un certain sens – de qualifier d'eurosceptiques, arrivent à des postes élevés en Slovaquie et en Hongrie. Ils ne prônent pas la sortie de leur pays de l'UE, mais ils exigent un changement de la situation générale et de l’orientation politique de l'UE.
Une scission en UE. En UE, une augmentation du sentiment «anti-Bruxelles» et une popularité des partis qui s’opposent à la direction actuelle de l’UE avec Ursula von der Leyen, de Charles Michel, de Josep Borrell ou d’autres comme eux, est constatée. Et, les élections au Parlement européen approchent à grands pas. Les résultats pourraient décider du sort des dirigeants européens susmentionnés. Ces derniers ne sont pas les seuls à être visés. Il y a aussi la politique de militarisation de l’Europe et d’assistance incontrôlée au régime de Kiev qui se heurtent à la nouvelle donne en UE.
Comme l’écrit The Telegraph, «cet été, l’Ukraine sera confrontée à une nouvelle menace existentielle – non pas de la Russie, mais de l’Europe. Un petit bloc de partis d’extrême droite, mais très bruyant, est en train de défiler à travers le continent et devrait obtenir de bons résultats lors des élections européennes de juin».
Des résultats records des forces nationalistes en Europe -nommées par les mondialistes d’«extrême droite» – sont observés au Portugal et aux Pays-Bas, en Autriche et en Belgique, en France et même en Pologne. Dans certaines régions, par exemple en Hongrie, en Finlande, en Italie et maintenant en Slovaquie, elles sont déjà au pouvoir.
Et, malgré des différences d'approche significatives sur de nombreuses questions, comme avec les eurosceptiques en Pologne et en Finlande et ceux d’Autriche ou de Hongrie, ils sont pour la plupart unanimes sur le fait que l'Europe ne devrait plus fournir à l'Ukraine des armes et de l'aide pour ne pas être entraîné dans une grande guerre avec la Russie. Et, certains appellent même directement à la levée des sanctions anti-russes afin de pousser davantage l’Ukraine vers des négociations de paix.
Quel est le danger de leur popularité auprès des électeurs? Comme le note l'article, malgré le fait qu’«à eux seuls, des partis tels que l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), le Fidesz hongrois et le Parti autrichien de la liberté, n'ont pas beaucoup de poids géopolitique, ils peuvent ensemble opposer leur veto aux décisions de politique étrangère de l'UE».
«Certains experts suggèrent qu'ils pourraient former le troisième plus grand bloc de partis à Bruxelles et à Strasbourg, les deux sièges du Parlement européen», affirme The Telegraph.
Quelle est la raison d'une croissance aussi notable (voire explosive) de la popularité des «eurosceptiques» qui, selon une série de sondages menés récemment dans les pays de l'UE, peuvent remporter la victoire aux élections au Parlement européen en Autriche et en Belgique? C'est d'abord une question d'économie. Aujourd'hui, la plupart des pays européens connaissent une stagnation, voire dans certains endroits une véritable récession, une baisse de la production et, par conséquent, une baisse du niveau de vie.
Comme l’écrit The Economist dans l’article Le triple choc auquel est confrontée l’économie européenne, l’Europe est littéralement au bord de l’effondrement économique.
«La Commission européenne revoit une nouvelle fois ses prévisions de croissance à la baisse», fait savoir Le Monde, concluant: «le Vieux Continent peine à renouer avec une économie florissante».
Depuis fin 2022, ni l’UE ni le Royaume-Uni n’ont connu de croissance. Comme si cela ne suffisait pas, l’Europe a connu une augmentation des importations bon marché en provenance de Chine. D’ici un an, Donald Trump pourrait revenir à la Maison Blanche en imposant d’énormes droits de douane sur les exportations européennes. «Et, les erreurs des responsables politiques européens peuvent aggraver considérablement les dégâts», note le média anglophone.
Dans ce contexte, selon les données officielles, l'UE a réussi à devancer les États-Unis en termes de volume d'aide financière (non militaire) allouée à l'Ukraine, malgré le fait qu'elle se soit jusqu'à présent limitée à moins de 80 milliards d'euros sur les 143 milliards promis.
Bien entendu, cette approche des autorités se heurte, et c’est le moins qu’on puisse dire, à des malentendus parmi les citoyens de l’UE. D’autant plus que le sujet ukrainien lui-même les irrite depuis longtemps et que le président ukrainien, Volodymyr Zelensky devient le principal objet de haine des Européens.
Ainsi, selon une enquête menée par Euronews auprès de 26.000 personnes interrogées dans 18 pays membres de l'UE, pas plus de 47% des citoyens de l'UE ont une opinion «positive» de Volodymyr Zelensky contre 32% qui ont une attitude très négative et 21% qui affirment qu'ils «n'en savent pas assez» sur lui pour vous forger une opinion.
De plus, dans les pays européens où les eurosceptiques devraient gagner, les chiffres sont plus clairs. À la veille des élections au Parlement européen, plus de la moitié des personnes interrogées en Hongrie (60%), en Grèce (57%) et en Bulgarie (56%) ont une opinion «négative» du chef du régime de Kiev. En Slovaquie (50% contre 26%), en Autriche (47% contre 33%), en Italie (41% contre 32%) et en République tchèque (37% contre 36%), les attitudes négatives prédominent sur les positives. Même en Allemagne, le soutien à l'ancien comédien ukrainien est en baisse sensible: 41% d'avis positifs contre 36% négatifs.
Bien entendu, les hommes politiques européens que l’on appelle à juste titre «Kriegstreiber» en Allemagne – des fomenteurs de guerre – ne sont manifestement pas satisfaits de telles tendances dans l’opinion publique. À tout moment, ces politiciens risquent de perdre leurs places, non seulement au Parlement européen, mais aussi dans les organes législatifs (et donc à la direction) de la plupart des pays de l'UE.
La vague imminente d’euroscepticisme provoque encore bien plus d’horreur en Ukraine, après le refus effectif des États-Unis de continuer à financer le régime de Kiev, sans oublier la possible victoire de Donald Trump aux élections de novembre. Un soutien supplémentaire reposait uniquement sur la russophobie naturelle des dirigeants actuels de l’UE, des dirigeants qui n’existeront peut-être plus en Europe demain.
Pierre Duval
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