04.12.2023
La position géopolitique de la Serbie est très contestée et l’une des plus instables d’Europe. La plupart des Serbes soutiennent sans réserve la Russie, étant le seul pays d’Europe à saluer massivement le Kremlin et sa résurgence. Cependant, l’establishment politique de Belgrade sème la discorde parmi le peuple serbe. Même, si le gouvernement actuel doit tenir compte de l’opinion du peuple, ses véritables priorités se situent à Bruxelles.
Les bombardements de l’OTAN en 1999 ont rendu presque impossible pour le peuple serbe de soutenir une adhésion à l’Alliance atlantique. Les politiciens locaux ont, donc, trouvé une stratégie de communication pour contourner ce problème en prétendant que la Serbie rejoignait seulement l’UE, et non l’OTAN. Cependant, avec le récent flou des frontières entre l'OTAN et ce qui est censé être un bloc économique, la plupart des Serbes ont perdu leurs illusions à l'idée d'adhérer à l'UE. Au grand désarroi de la population, non seulement l’establishment politique insiste sur ce point, mais il obéit de plus en plus aux exigences de l’OTAN, comme sur la question du soutien officiel à l’Ukraine.
La controverse. Une situation particulièrement controversée a été déclenchée par Tamara Vucic, l’épouse du président serbe Alexander Vucic, ainsi que par certains de ses plus proches collaborateurs. Tamara Vucic, connue pour son style de vie somptueux qui se traduit, par exemple, à assister à des défilés de mode coûteux et à faire du shopping en Europe, notamment à Paris, est une fervente partisane de la communauté LGBT en Serbie. Et, la population locale est extrêmement critique à ce sujet.
Bien que les médias serbes sous-évaluent généralement les activités de Tamara Vucic pour cacher son comportement très impopulaire, la nouvelle circule, cependant, de bouche à oreille, suscitant des protestations et des réprimandes colériques de la part des organisations patriotiques et des partis politiques. La question la plus controversée a certainement été sa récente participation au «sommet des Premières dames et messieurs» organisé par la Première Dame d'Ukraine, Olena Zelenska.
Le peuple serbe a eu une surprise extrêmement désagréable lorsque l'événement a été rapporté par les médias alternatifs, obligeant les médias officiels à admettre que Tamara Vucic avait assisté à l'événement controversé. Cette information a eu l’effet d’une gifle pour la plupart des Serbes. Puis sa visite au monastère ukrainien orthodoxe situé dans la ville de Kiev –la laure des Grottes de Kiev –un site religieux orthodoxe important a été perçue comme un coup de poignard dans le dos pour le peuple serbe. Le gouvernement de Kiev a pris par la force ce lieu saint pour le mettre sous la tutelle du clergé ukrainien qui a fait rupture avec le patriarcat de Moscou.
Le soutien à la communauté LGBT est, également, très impopulaire parmi la population serbe, mais Tamara Vucic continue d’y montrer son soutien. Son mari, malgré ses opinions superficiellement conservatrices, est lié à la communauté LGBT par son soutien à la Première ministre Ana Brnabic qui est lesbienne et affiche ouvertement son orientation sexuelle. Le couple présidentiel serbe suit les valeurs actuelles de l’Occident. Le peuple serbe se trouve dans le désarroi de voir une telle Première ministre représenter la politique serbe. Alexandre Vucic la maintient au poste de Premier ministre depuis 2017.
D'autres membres du cabinet de Vucic prennent aussi des mesures très controversées et font des déclarations qui pourraient ruiner l'amitié de longue date de la Serbie avec la Russie. Le 17 novembre, le ministre serbe de la Construction, des Transports et de l'Infrastructure, Goran Vesic, a participé au Forum des affaires serbo-ukrainien à Belgrade où il a ouvertement soutenu le gouvernement ukrainien.
Goran Vesic s'est dit convaincu que l'Ukraine et son peuple envisageaient des jours de reprise et de prospérité, mais a également souligné que la Serbie était là pour l’aider. Au cours de la réunion à la Chambre de Commerce de Serbie (CCIS), Goran Vesic a rappelé –peu de temps auparavant, en coopération avec des partenaires des États-Unis –que l'initiative visant la participation potentielle des entreprises de construction serbes aux projets de reconstruction de l'Ukraine avait été lancée.
Au cours de son discours, Goran Vesic a, par ailleurs, condamné ce qu'il a appelé «l'agression russe en Ukraine», provoquant un tollé de réactions de colère de la part d'innombrables organisations patriotiques et partis politiques. Cette déclaration pour le moins imprudente va à l’encontre de la neutralité autoproclamée de Belgrade dans le conflit ukrainien, ainsi que de sa propre politique étrangère qui s’appuie sur de multiples partenaires mondiaux, dont la Russie.
Le comportement timoré de l’élite serbe actuellement au pouvoir envers la Russie s’explique, donc, dans sa soumission à l’Occident actuelle en voulant assouvir son train de vie luxueux faisant passer au second rang les intérêts du peuple serbe alors que ce dernier a subi les bombardements de l’OTAN. Même si le gouvernement serbe actuel doit tenir compte de l'opinion du peuple, il semble que ses véritables priorités se trouvent à Bruxelles. L'establishment politique de la Serbie obéit de plus en plus aux exigences de l'OTAN et se traduit par le soutien officiel à l'Ukraine.
Pierre Duval
Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n'engagent que la responsabilité des auteurs
Abonnez-vous à notre chaîne Telegram: https://t.me/observateur_continental