21.04.2023
Les pays d’Amérique latine refusent le diktat washingtonien et se positionnent de plus en plus activement au sein de l’ordre multipolaire international. Y compris les principaux poids lourds de la région. Cela déplait énormément à l’establishment étasunien, mais c’est une réalité avec laquelle il faudra compter.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov se trouve en nouvelle tournée internationale, cette fois-ci en Amérique latine. Le tout après la récente tournée sur le continent africain. Le Brésil fut le premier pays concerné par cette visite latino-américaine, suivi par le Venezuela, le Nicaragua et enfin Cuba.
Au Brésil – le ministre russe des Affaires étrangères a rappelé que les pays concernés sont unis par le désir d’un ordre international polycentrique plus juste. Cela au moment d’ailleurs où Washington, dans son arrogance si habituelle, a accusé le Brésil (huitième puissance économique mondiale en termes de PIB à parité du pouvoir d’achat) «de se faire l’écho de la propagande russe et chinoise».
L’inquiétude US est évidemment partagée par les principaux suiveurs de la politique étasunienne, à savoir les régimes bruxellois. Ainsi, la chaîne européiste Euronews se pose la question si le Brésil ne serait tout simplement pas aligné sur Moscou et Pékin? En rappelant par la même occasion que les récentes déclarations du président brésilien Lula auraient «irrité» les Occidentaux. Notamment quant au fait que Washington et Bruxelles devaient cesser d’encourager la guerre en Ukraine.
A cela s’ajoutent évidemment les récents appels du chef d’Etat du Brésil, durant son déplacement en Chine, aux pays en développement à œuvrer ensemble pour remplacer le dollar US par leurs propres monnaies dans le commerce international. Un processus de dédollarisation qu’Observateur Continental avait déjà traité et qui prend effectivement et plus que jamais son envol à l’échelle mondiale.
Ce qui inquiète évidemment Washington et ses sous-traitants dans la configuration actuelle, c’est que la solidarité des pays BRICS est plus que jamais forte, y compris dans le cadre de cette dédollarisation en cours, où chacun des pays concernés met en action les mécanismes nécessaires – bilatéraux comme multilatéraux. Dans le cadre du trio Chine-Russie-Brésil, ce qui met également en extrême colère les régimes occidentaux et leurs quelques affiliés – c’est que les trois pays sont représentés au sein du Conseil de sécurité de l’ONU. Pékin et Moscou en qualité bien évidemment de membres permanents, Brasilia actuellement en tant que membre non-permanent.
Et lorsqu’on sait que les trois pays représentant à eux seuls une population totale de plus d’1,8 milliard d’habitants et étant par la même occasion respectivement la première, sixième et huitième économies mondiales en termes de PIB à parité du pouvoir d’achat, cela représente des données et statistiques que les Occidentaux détestent voir publier. Pourtant il faudra bien s’en habituer.
Au-delà du Brésil et en ce qui concerne les autres partenaires privilégiés de Moscou en Amérique latine, à savoir comme déjà indiqué le Venezuela, le Nicaragua et Cuba (bien que le chef de la diplomatie russe a également eu des discussions avec ses homologues de Bolivie et de Saint-Vincent-et-les-Grenadines dans le cadre de cette tournée), les autres inquiétudes washingtoniennes sont également connues. En l’occurrence l’augmentation de la coopération militaro-technique et l’éventualité de la création de bases militaires russes dans ces pays, avec tout ce que cela implique.
Après tout, ce n’est pas seulement une question de réponse proportionnelle et amplement justifiée face à la présence étasunienne aux frontières occidentales de la Russie, mais c’est également et peut-être surtout une question de sécurité pour les Etats latino-américains en question face aux incessantes tentatives washingtoniennes d’interférence et de déstabilisation dans les affaires intérieures et régionales des pays concernés. D’autant plus que d’un point de vue purement militaro-stratégique, le fait que la Russie soit le leader mondial avec la Chine en matière d’armement hypersonique – constitue déjà une réponse suffisante quant aux possibilités de frapper le territoire étasunien en cas de riposte nécessaire. Et cela au départ du territoire russe et sans avoir la nécessité de le faire à partir de pays tiers.
Dans tous les cas – l’Amérique latine n’est pas l’arrière-cour des néocolonialistes de Washington. Y compris dans le volet économique qui restait longtemps le maillon faible des Etats latino-américains dans leur dépendance face à une puissance sans civilisation digne de ce nom. A l’heure où d’ailleurs même économiquement la Chine a largement mis de côté les USA en qualité de principal partenaire économico-commercial des pays de la région. Y compris en passant du Brésil et ce depuis plusieurs années maintenant.
Mikhail Gamandiy-Egorov
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