L’ESA (l'Agence spatiale européenne) a attribué un contrat de 129,4 millions d’euros pour la première mission de l’Agence en matière de défense planétaire couvrant la conception détaillée, la fabrication et les essais d’Hera.
Cette mission ambitieuse, écrit le site de l'ESA, «sera la contribution de l’Europe à un effort international de déviation d’astéroïdes, destiné à effectuer une exploration soutenue d’un système à double astéroïde». La description du projet, présenté comme européen, pour le leadership fait bondir de sa chaise tout en révélant la volonté de l’homme de contrôler aussi les corps célestes dans l’espace.
Derrière l'aspect romantique décrit par l'ESA où on apprend que «Hera est le nom de la déesse grecque du mariage», on obtient entre les lignes l'information que celui-ci n'est pas égalitaire et que le marié allemand tient l'essentiel des cordes dans ce mariage qui se dit européen. L'ESA indique que le contrat a été signé le 15 septembre «par Franco Ongaro, directeur de la technologie, de l'ingénierie et de la qualité de l'ESA, et Marco Fuchs, PDG de la société spatiale allemande OHB, maître d'œuvre du consortium Hera. La signature a eu lieu au centre ESOC de l'ESA en Allemagne, qui servira de contrôle de mission pour le Hera lancé en 2024».
La France, réduite en fournisseur d'un élément comme d'autres pays européens, à lire l'annonce de l'ESA, va fournir le radar basse fréquence de la Juventas ainsi que des suiveurs d'étoiles et un soutien à la planification des opérations de charge utile et aux trajectoires de proximité des CubeSats, mais ne sera pas le décideur final dans ce nouveau projet, ni d’ailleurs un autre pays européen.
Seul l'Allemagne avec le siège allemand d'Hera aura donc le mot à dire à en croire cette constellation des responsabilités. D'ailleurs, le site de l'ESA écrit bien noir sur blanc que «le contrôle de mission d’Hera sera basé au centre ESOC de l’ESA à Darmstadt, en Allemagne qui abrite également le nouveau programme de sûreté et de sécurité spatiales de l’ESA, dont Hera fait partie» et que «le marché a été attribué à un consortium dirigé par le maître d'œuvre OHB System AG à Brême».
«Hera sera, avec le vaisseau spatial Double Asteroid Redirect Test (DART1) de la NASA, la première sonde de l'humanité à se retrouver avec un système d'astéroïdes binaires, une classe peu connue représentant environ 15% de tous les astéroïdes connus», indique l'ESA. On apprend qu'«Hera est la contribution européenne à une collaboration internationale de défense planétaire entre scientifiques européens et américains appelée Asteroid Impact & Deflection Assessment (AIDA)» et que «le vaisseau spatial DART - dont le lancement est prévu en juillet 2021 - effectuera d'abord un impact cinétique sur le plus petit des deux corps» et qu' «Hera fera un suivi avec une enquête post-impact détaillée pour transformer cette expérience à grande échelle en une technique de déviation d'astéroïdes bien comprise et reproductible».
Hera, de la taille d'un bureau, comme les voitures modernes sans conducteur sur Terre, sera capable d'avoir une navigation autonome autour de l'astéroïde pour recueillir des données scientifiques cruciales utiles aux scientifiques et aux futurs planificateurs de mission afin de mieux comprendre les compositions et les structures des astéroïdes. Le site de l'ESA précise que «Hera déploiera également les premiers «CubeSats» d'Europe (satellites miniatures construits à partir de boîtes de 10 cm) dans l'espace lointain pour la surveillance des astéroïdes de près, y compris la toute première sonde radar de l'intérieur d'un astéroïde, en utilisant une version mise à jour du système radar de la mission comète Rosetta de l’ESA».
Hera devra être lancé en octobre 2024 pour se rendre dans un système d'astéroïdes binaires - la paire Didymos d'astéroïdes géocroiseurs. L'ESA précise que «le corps principal de la taille d'une montagne de 780 m de diamètre a une lune de 160 m, officiellement baptisée en juin 2020 "Dimorphos'', d'environ la même taille que la grande pyramide de Gizeh», qui se trouve en orbite autour et que Hera arrivera au système Didymos à la fin de 2026 pour effectuer au moins six mois d'étude rapprochée. En septembre 2022, l'impact cinétique de DART sur Dimorphos devrait modifier son orbite autour de Didymos et créer un cratère substantiel. «Cet astéroïde lunaire deviendra unique, en tant que premier corps céleste à avoir ses caractéristiques orbitales et physiques intentionnellement modifiées par l'intervention humaine», explique l'ESA.
(1) DART est un test de technologies axé sur la défense planétaire pour empêcher un impact de la Terre par un astéroïde dangereux. DART sera la première démonstration de la technique de l'impacteur cinétique pour modifier le mouvement d'un astéroïde dans l'espace Source: https://www.nasa.gov/planetarydefense/dart
Philippe Rosenthal
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