Le coup d'Etat en Bolivie intervient moins d'une semaine après la fin des négociations entre Evo Morales, le président de la Bolivie obligé de quitter son pays, et une firme multinationale exploitant le lithium.
La Bolivie a des gisements de lithium qui permettent de fabriquer des batteries comme celles utilisées dans les voitures électriques. Le coup d'Etat, qui a conduit dimanche à la démission d'Evo Morales et poussé le président à se réfugier au Mexique, est officiellement le fruit du résultat de journées de protestations du fait d'éléments de la droite en colère contre le gouvernement de gauche d'Evo Morales. La sénatrice Jeanine Añez, du parti de centre-droit Unité de la démocratie, est, en prévision des élections, actuellement présidente par intérim du gouvernement de l'Etat plurinational de Bolivie à la suite du coup d'État.
David Atkins, collaborateur de Washington Monthly a tweeté: «Le lithium en Bolivie appartient au peuple bolivien. Ce n'est pas la propriété des entreprises multinationales. Le coup militaire de dimanche en Bolivie a mis en place un gouvernement qui devrait changer la décision prise par le président démissionnaire, Evo Morales, qui avait annulé un accord stratégique avec une société allemande pour l'exploitation de gisements de lithium dans ce pays d'Amérique latine permettant la fabrication de batteries comme celles utilisées dans les voitures électriques». https://twitter.com/DavidOAtkins/status/1193970669286899712 David Atkins insiste sur le fait que «le lithium bolivien appartient au peuple bolivien» et «pas aux multinationales». L'analyste, Argus, spécialisé dans les investissements, a invité les investisseurs à suivre de près l'évolution de la situation et a noté que la production de gaz et de pétrole de sociétés étrangères en Bolivie était restée stable. Le gouvernement d'Evo Morales avait annoncé à l'époque qu'il était «déterminé à industrialiser la Bolivie et a investir des sommes énormes pour garantir que le lithium destiné à l'emploi des piles et batteries soit transformé dans le pays pour l'exporter uniquement pour servir les intérêts du pays sous forme d'une valeur ajoutée».
Evo Morales a refusé un accord avec une firme internationale exploitant le lithium. Le président de la Bolivie, actuellement en fuite, avait décidé d’annuler le 4 novembre dernier un accord commercial qui avait été réalisé en décembre 2018 avec la firme allemande ACI Systems Alemania (ACISA). C'est après plusieurs semaines de manifestations réalisées par des habitants de la région de Potosí où le lithium doit être exploité que Evo Morales a pris sa décision. La région du Potosí dispose de 50% à 70% des réserves mondiales en lithium et cette réserve se trouve dans les salines du Salar de Uyuni. Parmi les clients de la société allemande ACISA, on trouve le groupe Tesla d' Elon Musk. Il est à signaler que les actions de Tesla ont augmenté lundi après le coup d'Etat. L’annulation de l’accord ACISA par le président déchu a ouvert la porte à une renégociation de l’accord avec des termes générant davantage de profits pour la population de la région ou à la nationalisation pure et simple de l’industrie d’extraction du lithium en Bolivie.
Comme Bloomberg News l'a noté en 2018, cette réserve fait de la Bolivie un lieu stratégique dans l'économie mondiale pour la prochaine décennie. En effet, la demande de lithium devrait plus que doubler d’ici 2025. Ce minerai est surtout extrait en Australie, au Chili et en Argentine. Mais la Bolivie, qui en a beaucoup, possède 9 millions de tonnes de Lithium qui n'ont jamais été exploitées commercialement et cela représente la deuxième plus grande production au monde. Jusqu'à présent, il n'existait aucun moyen pratique de l'exploiter et de le vendre.
Les répercussions sur le secteur du lithium et son exploitation ne sont pas encore connues suite à ce coup d'Etat comme l'indique, Stratfor, la société mondiale d'analyse du renseignement. À long terme, l'incertitude politique persistante rendra plus difficile pour la Bolivie sa capacité à augmenter sa production de métaux stratégiques comme le lithium ou à développer un secteur à valeur ajoutée sur le marché des batteries. Le climat peu propice aux investissements intervient à un moment où les opportunités mondiales dans la production de batteries au lithium se multiplient pour répondre à la demande croissante provenant de la fabrication de véhicules électriques. La semaine dernière, ACISA avait déclaré au média allemand Deutsche Welle: «Nous sommes confiants que notre projet de lithium sera repris après une phase de calme politique et de clarification».
La décision d'Evo Morales tombe à un moment où l'industrie allemande est justement en train de réorienter sa production automobile sur les voitures électriques roulant avec des batteries fabriquées au lithium et fournies par la société allemande ACISA comme l'écrit la Deutsche Welle https://www.dw.com/en/bolivia-scraps-joint-lithium-project-with-german-company/a-51100873 . A côté de Berlin, dans le Land de Brandenbourg, à proximité du tout nouveau aéroport international le BER, Elon Musk a déclaré ouvrir ce mercredi dernier une usine employant 8000 salariés pour produire des voitures électriques https://www.arcor.de/article/US-Elektroautobauer--Elon-Musk--Tesla-baut-europaeische-Fabrik-bei-Berlin/hub01-home-news-wirtschaft/8846698 . Le gouvernement allemand continue de célébrer en grande pompe cette décision qui doit conforter l'Allemagne comme le leader dans la production des voitures de la nouvelle génération.
Olivier Renault