Le général (2S) Dominique Delawarde – Ancien chef «Situation-Renseignement-Guerre électronique 19» à l’Etat-major interarmées de planification opérationnelle, a été «auditionné» durant une heure le 3 octobre 2019 par le rapporteur «défense» de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale sur l'OTAN. Dans cette audition, qui n'a pas été reprise dans les média officiels, le général Delawarde, qui ne souhaite pas divulguer ses réponses d'une manière précise, a cependant évoqué sur le site EVERIS «cinq actions menées en ignorant l'ONU, sous l'égide des USA, avec engagement de l'OTAN ou participation importante de pays membres de l'Alliance, qui ont toutes eu des conséquences désastreuses non seulement pour les pays concernés, mais aussi pour l'Union Européenne et pour la France». Le général Delawarde fait la démonstration du danger que représente l'OTAN aujourd'hui pour la paix mondiale et évoque l'alliance OCS-BRICS qui permet de faire un poids décisif contre l'OTAN.
Le général Delawarde évoque «le bombardement du Kosovo en 1999; les fausses accusations contre l'Irak de détenir des armes de destructions massives en 2003; l'intervention de l'OTAN en 2011 au profit des insurgés dans l'affaire libyenne; l'intervention en Syrie des U.S.A. en 2014 sans accord de l'ONU à la tête d'une coalition comprenant, une fois encore, plusieurs pays de l'OTAN et plusieurs pays arabes connus pour leur financement du terrorisme qu'ils disent pourtant combattre en Syrie et l'intervention le 14 avril 2018 sans accord de l'ONU sur des infrastructures syriennes supposées contenir des stocks de gaz». Le général Delawarde, au vu de ces exemples, demande de se poser des questions sur le rôle de l'OTAN. La nouveauté, l'autorité française se pose des questions sur l'OTAN et écoute l'expert militaire.
«En réaction à cette première ingérence illégale de l'OTAN, la Russie et la Chine, trop faibles à l’époque pour réagir efficacement, mais humiliées (la Chine par le bombardement de son ambassade à Belgrade, la Russie par la défaite d’un allié fidèle et le mépris des occidentaux, agissant sans mandat de l’ONU) ont décidé de s’organiser et surtout de se réarmer. Dès le 15 juin 2001, ils créent l'OCS (Organisation de Coopération de Shanghai), avec une coopération économique et militaire visant à assurer la sécurité collective de ses Etats membres. Cette organisation s'est élargie et compte aujourd'hui huit membres dont quatre puissances nucléaires (Russie, Chine, Inde, Pakistan). Elle prône la multi-polarité et la non ingérence dans les affaires d'Etats souverains. Elle constitue clairement, bien qu’elle s’en défende, une opposition désormais ferme et puissante aux prétentions hégémoniques de la coalition occidentale et de l'OTAN» explique le général Delawarde sans oublier le rôle des BRICS qui «vise aussi à promouvoir la multi-polarité, la réforme de l’ONU pour la rendre plus représentative, mais surtout l’évolution de la gouvernance et des règles du jeu de l’économie mondiale pour les rendre plus justes». «Un nombre croissant de pays se rallie, jour après jour, au camp OCS-BRICS, à la multi-polarité et à la non ingérence, c'est à dire à une opposition claire aux pratiques de l'OTAN agissant unilatéralement hors de tout mandat de l'ONU».
Le général Delawarde, après avoir exposé divers points apportant les preuves des actions de l'OTAN sans tenir compte de l'ONU, arrive à la conclusion qu'il faille revoir le rôle de l'OTAN: «En conclusion, il paraît urgent, pour la représentation nationale, de se poser quelques questions. L'OTAN peut-elle et/ou doit-elle continuer de se substituer à l'ONU pour intervenir aujourd'hui, à sa guise, tous azimuts et sous tous prétextes, dans les affaires du monde? Qu'y gagne la France et surtout qu'y perd-elle en terme de crédibilité et d'image d'un état «indépendant» et «souverain» dont la voix voudrait encore compter? Doit-elle continuer de suivre aveuglément les USA lorsqu'ils ignorent et méprisent l'ONU et lorsqu'ils s'écartent de la légalité internationale? Ne devrait-elle pas, au contraire, reprendre ses distances avec l'organisation militaire intégrée qui la lie trop souvent aux visions de quelques fous furieux de Washington, pour le pire et non pour le meilleur?».
Le général Delawarde, qui dit «n'avoir guère d'illusion sur une éventuelle reprise de son analyse sur six articles à venir sur le site IVERIS par des sites mainstream», explique qu'à la veille du sommet de l'OTAN à Londres les 3 et 4 décembre 2019 «l'OTAN est aujourd’hui en phase de réflexion en vue d’élaborer un nouveau concept stratégique qui devrait voir le jour en 2020» et qu'«il ne fait guère de doute que ce nouveau concept devrait poursuivre l’élargissement du spectre des domaines et des zones d’intérêt de l’OTAN, et donc de ses interventions potentielles (Espace, Guerre de l’information, Afrique, Mer de Chine...)», précisant que «la menace chinoise qui n’était pas vraiment évoquée dans la dernière édition du concept (2010) devrait l’être bien davantage dans la version 2020».
Olivier Renault